C’est officiel, le tunnel du Mont-Blanc fermera pour 15 semaines à partir du 2 septembre, avec des conséquences importantes sur les transports entre la France et l’Italie. Les quelque 2 000 camions qui circulent quotidiennement dans les deux sens chercheront d’autres itinéraires pour acheminer leurs marchandises vers la France (Rhône-Alpes et Ile-de-France principalement), le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Ces pays sont en effet les destinataires et l’origine du trafic en provenance des régions du nord-ouest de l’Italie (Piémont et Lombardie en premier lieu).
Les itinéraires alternatifs
Les alternatives sont peu nombreuses. Pour traverser les Alpes entre la France et l’Italie par la route, il y a essentiellement trois possibilités : le tunnel routier du Fréjus, l’autoroute via Vintimille et, bien sûr, le tunnel du Mont-Blanc.
Le mode ferroviaire est peu utilisé, car la ligne entre la Ligurie et la Côte d’Azur est caractérisée par de fortes limitations de poids et de gabarit et la ligne historique du Fréjus (actuellement fermée en raison de l’éboulement d’août 2023) est utilisée par quelques dizaines de trains de marchandises par jour en raison des limitations du nombre de voies disponibles et du coût de trois locomotives pour atteindre 1300 m d’altitude avec 1600 tonnes de fret (le poids d’un train commercial).
Le chemin de fer du Fréjus est préféré au passage ferroviaire à travers la Suisse (via le Simplon et le Lötschberg, deux tunnels transalpins qui totalisent environ 54 kilomètres sous les montagnes), qui est plus fiable et dispose de plus de voies disponibles.
Il n’y a donc que peu d’options ferroviaires pour les camions qui trouveront le tunnel du Mont-Blanc fermé. L’alternative qui sera utilisée sera la route du Fréjus par laquelle passent déjà aujourd’hui quelque 3 000 poids lourds par jour, en plus du trafic léger de voitures et de motos. Mais que se passera-t-il en cas de problèmes entre Bardonecchia et Modane pendant les 15 semaines de fermeture du tunnel du Mont-Blanc ?
Que faire en cas d’urgence ?
La remise en état du tunnel du Mont-Blanc ne peut se faire du jour au lendemain : des sources officieuses parlent d’au moins 7 à 10 jours pour le rendre à nouveau praticable. Les 5 000 camions (environ 2 000 au tunnel du Mont-Blanc et 3 000 au tunnel du Fréjus) par jour trouveraient le passage nord-ouest des Alpes occidentales totalement fermé, sans qu’aucune alternative viable ne soit prête à les accueillir.
Vintimille connaît déjà un trafic journalier de près de 5 000 camoins par jour, le Grand-Saint-Bernard a des voies d’accès incompatibles avec un trafic de milliers de poids lourds par jour, et la Suisse a des règles et des politiques et même un article dans sa constitution qui prévoit de limiter le nombre de véhicules lourds pour des raisons de sécurité et d’environnement. Rappelons qu’en Suisse, la circulation des poids lourds est également interdite la nuit (de 22 heures à 5 heures).
La leçon de l’automne 2023
Dans le Val d’Aoste, mais aussi en Haute-Savoie, il y a eu une véritable urgence dans les premiers jours de septembre, atteignant 60 km de bouchons pour franchir le tunnel du Mont-Blanc après la fermeture de l’autoroute française dans la vallée de la Maurienne à quelques kilomètres du tunnel du Fréjus.
La situation s’est ensuite stabilisée grâce à la gestion des zones pulmonaires. Mais on peut dire que « ça s’est bien passé » car si l’éboulement près de Fréjus, à Saint-André en Maurienne, s’était produit quelques semaines plus tard, le tunnel du Mont-Blanc aurait été fermé et n’aurait pas été rouvert tout de suite.
Les passages des cols de Larche, de l’Agneau, du Petit-Saint-Bernard et du Mont-Cenis ne sont pas adaptés au franchissement par des camions d’un poids maximal de 44 tonnes. Les routes d’accès à ces cols ne permettent pas un tel trafic, sauf pour un échange local de marchandises. Ceux qui pourraient potentiellement être utilisés comme alternative aux autoroutes sont la route nationale de Monginevro et le tunnel de Tenda. La première est restreinte par des accords entre les préfectures pour limiter le trafic et le second est fermé pour rénovation. Cependant, les deux vallées ne sont pas adaptées et prêtes à recevoir une invasion de camions.
Nous sommes prévenus, quelqu’un pense-t-il à un plan d’urgence pour l’automne prochain ?
(Giancarlo Bertalero est un expert du transport transalpin. Il est l’auteur de la Guida ai trasporti merci attraverso le Alpi, publié par Franco Angeli.)
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