Le souvenir de la reine Marguerite est omniprésent à Gressoney. Une villa à son nom, un château au nom de sa dynastie, et une boucle de promenade qui relie les deux, en traversant le village. Marguerite aimait Gressoney. Elle aimait le mont Rose.

La longue histoire d’amour scellée entre la Reine Marguerite et cette vallée au pied du Mont Rose commence par sa rencontre avec le Baron Peccoz.

Qui était le Baron Peccoz ? Pourquoi la reine Marguerite a-t-elle tellement apprécié de venir en vacances au pied du Mont Rose ? Quels souvenirs de son passage y retrouve-t-on ?

Gressoney, au pied du Mont Rose a été le théâtre d’une des plus belles histoires romantiques de la fin du XIXème siècle. C’est cette histoire que nous souhaitons vous raconter.

La Reine Marguerite, une trajectoire de vie inattendue

Regina Margherita di Savoia (c) Public Domain Wikimedia Commons

Orpheline de père, une mère avec une mauvaise réputation, membre elle-même de la famille royale, Marguerite n’avait pratiquement aucune chance de devenir un jour reine d’Italie. Et pourtant…

Marguerite a dix ans lorsqu’en 1861, son oncle Victor Emmanuel II devient Roi d’une Italie unifiée. Lors de cette course vers l’indépendance, le Roi a fini par se faire beaucoup d’ennemis, et en 1866 lorsqu’il recherche la main d’une femme pour donner une épouse à son fils, Humbert, duc d’Aoste, les grandes familles régnantes lui tournent le dos. C’est donc à l’intérieur de sa propre famille qu’il va devoir chercher celle qui partagera la vie de son fils. Et c’est ainsi qu’en 1868, Marguerite de Savoie-Gênes devint la femme d’Humbert 1er d’Italie. Trois ans plus tard, elle donna naissance à Victor Emmanuel (futur Roi Victor Emmanuel III), et dix ans plus tard, en 1878, lorsque son mari devint Roi Humbert 1er, elle devint la Reine Marguerite.

Très engagée dans la société civile elle stimulait les œuvres de bienfaisance, elle créa des organismes culturels, comme la Casa Dante, et devint très populaire auprès des italiens.

Marguerite aimait la montagne et se rendit dans la Vallée d’Aoste pour des séjours d’été dès 1880. Elle avait l’habitude de séjourner au château de Sarre. C’était le château royal de la famille depuis que Victor Emmanuel II, l’avait acheté pour y séjourner lors de ses battues de chasse. Son fils Humbert Ier en hérita et continua de l’embellir. La Reine Marguerite, tout naturellement vint y séjourner pour découvrir la beauté de la Vallée d’Aoste tout entière. En août 1888 elle découvrait Courmayeur et ses glaciers en compagnie d’amis…

Les Beck-Peccoz, descendants d’une famille walser

Castor et Lyskamm vus de Gressoney (c) CC BY SA 4 0 Wikimedia Commons

C’est dans la haute vallée du Lys, celle de Gressoney, et dans d’autres hautes vallées sur les versants italiens du Mont Rose à Alagna ou Macugnaga qu’habitaient (et habitent toujours) les descendants des Walser.

Ce peuple germanique installé à l’origine dans le Haut Valais a suivi au cours du Moyen-Âge les variations climatiques qui affectaient les Alpes.

Vers le XIIème siècle, une période de refroidissement avec une avancée des glaciers les a obligés à quitter les hautes terres en les renvoyant au nord des Alpes. C’est depuis l’Oberland Bernois que vers le XIVème siècle, avec le recul des glaciers qu’ils ont à nouveau colonisé le Valais oriental et en profitant d’un optimum climatique – c’est-à-dire d’une fonte importante des glaciers- ils ont même réussi à traverser la chaîne frontalière des Alpes pour se répartir sur l’ensemble des versants du Mont Rose.

Les habitats en bois, la langue, les costumes et les coutumes se retrouvent ainsi répartis sur l’ensemble du massif. Plus tard, avec le retour d’un climat plus froid et d’un mini période glaciaire, les hautes routes furent à nouveau barrées par les glaciers et les populations divisées dans des avenirs historiques très différentes. Une partie d’entre eux devint Suisse et une partie suivit l’histoire de la tracée par la Maison de Savoie qui possédait ces terres.

C’est le cas de la famille Beck. Une ancienne famille Walser, qui s’est retrouvée du côté sud du Mont Rose, vers Stafal, le dernier hameau de la vallée du Lys. Avec le temps, et par le jeu des pouvoirs en place, elle choisit de changer de nom, de le franciser, puisque la Vallée d’Aoste était de langue française, en De Peccoz (qui se prononce avec l’accent tonique sur le E, et dont le Z est sourd). Beck, « Pècco »… la transformation est faite.

Ces familles étant néanmoins alémaniques à l’origine, et vivaient souvent au nord des Alpes tout en gardant leurs terres ancestrales au sud de celles-ci. Elles étaient donc soumises à l’autorités de souverains alémaniques. C’est ainsi que les Beck furent élevés au grade de Baron parle Roi Louis Ier de Bavière en 1840, avant d’être confirmés au même grade par le Roi Charles Albert en 1842.

Louis Beck-Peccoz, ou Louis de Peccoz, baron et alpiniste

Les Beck gagnaient bien leur vie dans la siderurgie du côté d’Augsbourg, et ils souhaitaient posséder de belles demeures même lorsqu’ils venaient en villégiatures sur leurs terres natales. C’est ainsi que Louis Beck-Peccoz, descendant de la famille, décida de construire la belle villa Rose à Stafal, le village d’origine de sa lignée.

Mais Louis de Peccoz ne se satisfaisait pas d’une humble demeure. Il souhaitait faire construire une demeure plus adaptée à son rang. Il voulait un petit château. Et c’est ainsi qu’il fit achever de construire en 1888 cette somptueuse demeure, connue à l’époque sous le nom de Villa Peccoz.

C’était aussi un homme ambitieux qui fréquentait le beau monde. Il avait connu personnellement le père de Marguerite. En août 1888, il se dit qu’il allait rejoindre un groupe d’alpinistes de la haute société du côté de Courmayeur…

Mais avant de retrouver à Courmayeur le Baron Peccoz et la Reine Marguerite, faisons un saut à la Villa Peccoz.

La Villa Peccoz à Gressoney-Saint-Jean, connue plus tard comme Villa Margherita

Visite de la famille royale d’Italie à Gressoney Saint Jean, à la sortie de Villa Peccoz (c) Public Domain Wikimedia Commons

La Villa Peccoz se présente comme une grosse maison de montagne, à la façade claire , aux volets en bois foncé. Certaines fenêtres ont de petits balcons surmontés d’un joli toit pour les protéger des intempéries et profiter de la vue charmante sur la vallée. Une grande tour carrée, surmontée d’un toit pointu est intégrée au bâtiment pour lui donner son aspect de château. Au pied de cette tour, on retrouve une loggia vitrée sur une terrasse en pierre, qui devait donner envie de prendre de bons repas immergés dans la nature. Le parc, très grand, entoure la villa et lui assure la discretion et le silence voulus par le Baron Peccoz. C’est une villa de style éclectique. Nous sommes à la fin du XIXème siècle. L’Art Nouveau s’est développé partout en Europe, il impose son style libéré de l’austérité de l’ancien temps aussi dans les montagnes.  

La Villa Margherita a été rachetée par la commune de Gressoney en 1968 pour en faire l’hôtel de ville. Il faut demander l’accord de la Mairie pour en visiter certains espaces, pendant l’horaire d’ouverture de celle-ci. Les éléments les plus importants sont les deux portails principaux, construits en chêne massif et l’entrée, avec son sol en mosaïque de type Palladien depuis laquelle on peut admirer les escaliers centraux en bois avec balustrades en fer forgé surmontées de riches plafonds aux moulures en noyer et chêne.

Au premier étage, un couloir se distingue par sa décoration avec des miroirs, des coffres et des armoires encastrées, et son plafond décoré de peintures à l’huile représentant des motifs floraux. On y retrouve même, dans un petit studio indépendant, un tapis persan de vingt-cinq mètres carrés ! Partout, des poêles en céramique émaillée assuraient une chaleur et un confort constants dans cette grande maison située en altitude.

Alors Villa Peccoz ou Villa Margherita ? Pour comprendre la suite, il faut retourner à cet été de 1888  à Courmayeur.

L’invitation du Baron Peccoz à la Reine Marguerite

La Reine Marguerite avait quitté le château de Sarre pendant quelques jours pour découvrir les montagnes autour de Courmayeur. Avec des amis elle entreprit la traversée du Col du Géant. Sur le chemin du retour ils s’arrêtèrent pour la nuit au refuge du Papillon, sur le Mont Fréty. Histoire de passer encore quelques heures loin de la monotonie de la vie d’en-bas.

Ce fut au cours de cette soirée que le Baron Peccoz, un bouquet d’édelweiss à la main, selon les dires de l’époque, invita la reine Marguerite à découvrir les splendeurs du Mont Rose et de la vallée du Lys dès l’été suivant. Il serait son hôte, en lui laissant à disposition une belle Villa qu’il venait de faire construire et son guide pour grimper sur les sommets du Mont Rose.

L’invitation fut acceptée et la promesse tenue

Au cours du mois d’août 1889, la Reine Marguerite passa une semaine à Zermatt afin de découvrir le Riffelalm, le Gornergrat – au sommet duquel elle monta à dos de cheval- et les glaciers.

Elle grimpa au sommet du Breithorn (4166 mètres d’altitide), traversa la frontière du col du Théodule et redescendit vers Gressoney, chez son ami, le Baron Louis de Peccoz.

Comme promis, celui-ci quitta sa Villa et la laissa entièrement à disposition de Marguerite, qui s’y plut tellement qu’elle y retourna tous les étés entre 1889 et 1894.

Comme promis, également, Peccoz emmena son invitée gravir les 4634 mètres du sommet du Mont Rose. Ce qui fut chose faite le 18 Août 1889.

La Reine Marguerite devenait ainsi la première femme à gravir le sommet de cette montagne mythique.

Le refuge Marguerite (Capanna Margherita) sur la pointe Gnifetti

Capanna Regina Margherita (c) CC BY SA 3 0 Hejkal Wikimedia Commons

Lors de la montée au sommet, il apparut nécessaire de créer un refuge pour les alpinistes en altitude, sur la voie d’accès au sommet du Mont Rose.

C’est ainsi que les compagnies de Guide décidèrent de faire bâtir une cabane en dur pour que les alpinistes puissent se reposer et s’abriter des conditions extrêmes des ces altitudes, dès le passage de la Reine Marguerite. Les travaux commencèrent immédiatement avec la promesse que la Reine elle-même viendrait l’inaugurer.

Ce sera chose faite, sur la pointe Gnifetti, à 4554 mètres d’altitude, le 18 Aoùt 1993.

La Reine en personne assista à l’inauguration comme elle l’avait promis.

La Capanna Regina Margherita sulla Vetta Gnifetti (xilografia) (c) Public Domain Wikimedia Commons

Encore de nos jours c’est le refuge de montagne le plus haut des Alpes. Il a bien sûr été modernisé depuis. Il accueille 86 alpinistes en été et 20 en hiver.

On l’atteint facilement, en été – si on a de bonnes conditions physiques et le bon équipement, depuis Punta Indren, en amont de Alagna Valsesia. La traversée du glacier impose une bonne connaissance du terrain. Il est donc fortement recommandé de faire appel à l’expérience de guides de montagne.

On y dort près des étoiles, on y mange bien… peut-être même une bonne pizza Margherita, inventée par un pizzaiolo napolitain lors du passage de la reine dans sa ville et reprenant les couleurs du drapeau italien : le rouge de la tomate, le blanc de la mozzarella et le vert du basilic. C’était le mois de juin 1889 (encore 1889, quelle année !).

Reine Marguerite et Baron Peccoz, couple d’alpinistes

La Regina Margherita e il barone Beck Peccoz a Gressoney (c) Public Domain, Gressoney Monterosa

Entre 1889 et 1894, tous les étés, la Reine Marguerite et le Baron Peccoz se retrouvaient pour des ascensions dans le massif du Mont Rose.

Pour elle (et pour eux…) il avait fait construire une maison sur les hauteurs de Stafal pour admirer les chamois et partir vite vers les sommets. Ensuite une cabane d’altitude à 3000 mètres pour être au plus près des étoiles.

On ne connait pas beaucoup de détails de cette idylle amoureuse mais il existe quelques preuves comme cette mèche de cheveux de la Reine offerte à Peccoz à l’intérieur d’un banal calendrier-atlas – cadeau de la cour en vogue à cette époque.

Dès 1891, le peuple était au courant que le roi Humbert 1er avait une relation extra-conjugale de longue durée et personne n’aurait osé perturber l’éveil sentimental de Marguerite, dont le mariage n’avait jamais été un mariage d’amour, ni ne l’était devenu.

D’une promesse à l’autre, d’un été à l’autre, rendez-vous fut donné à l’été 1894 pour traverser les glaciers du Mont Rose et redescendre vers Zermatt, en Suisse.

L’été venu, Peccoz n’eut pas la force de lui dire que son cœur fragile serait en danger, tellement il était fasciné par cette femme aux rêves de montagne les plus ambitieux. Il la guida et l’accompagna comme les autres années depuis 1889, mais cette fois, aux abords du glacier de Grenz, son cœur le lâcha. Il tomba raide mort.

Un fin tragique et en même temps extrêmement romantique pour cette histoire qui sentait fort l’idylle amoureuse. Tronquée au plus près des étoiles.

L’histoire entre Peccoz et la Reine Marguerite s’arrêta là, d’un coup. Celle de la Reine et du Mont Rose aussi. Elle avait laissé là-haut son cœur et son nom, porté à jamais par un refuge perdu dans les glaces.

En revanche l’histoire entre la Reine et Gressoney continua. Elle continua de se rendre dans le village pour des balades dans la vallée. Et elle y laissa aussi un château féérique.

Le Château Savoie

Villa Margherita (c) CC BY SA 4 0 Plumbago Capensis Wikimedia Commons

Après la mort de son ami, le baron Peccoz, en 1894, la Reine Marguerite ne se sentit plus vraiment chez elle, là-haut, à Gressoney. Pourtant elle voulait préserver cette idée que cette vallée l’avait rendue heureuse et qu’elle pouvait encore y vivre des moments heureux.

Elle souhaitait y faire construire sa propre demeure. Un château à son image. Son mari, le roi Humbert Ier, fit lancer les travaux en 1889.  C’était son cadeau. Mais il n’en vit jamais l’achèvement eut l’idée de ce cadeau pour sa femme, ne le vit jamais. Il mourut en 1900, assassiné. Le Château fut achevé en 1904.

Le Château Savoie (Castel Savoia, en Italien) est prêt à recevoir Marguerite, ancienne Reine d’Italie, pour ses séjours d’été jusqu’à sa mort en 1926.

Lit de la Regina Margherita à Castel Savoia (c) CC BY SA 4 0 Bettylella Wikimedia Commons

Bâti à l’emplacement d’un belvédère naturel sur le massif du Mont Rose, un peu en hauteur par rapport au village de Gressoney Saint Jean, il dominait le paysage, restait à l’abri des regards et donnait à la vallée une nouvelle histoire architecturale.

Le Château Savoie est construit selon un style éclectique, tout comme la Villa Margherita, mais il se rapproche davantage d’un château de conte de fée avec ses tours rondes coiffées d’un toit rond et pointu. Le petit terrassement sur lequel il est bâti donne l’aspect d’un rempart infranchissable au milieu de la forêt. La couleur blanche de ses murs tranche avec le vert foncé des forêts de mélèzes. En automne, lorsque les mélèzes ont endossé leur couleur dorée, on dirait qu’il danse au milieu des flammes.

Le visiteur qui l’aperçoit entre les arbres est inconsciemment attiré vers lui. Il a forcément envie d’en savoir plus. Ce château doit forcément conserver des secrets, des anecdotes, des histoires. Cette extravagance architecturale contraste avec le mode de vie sobre et rude des populations montagnardes. Il est rare de trouver de tels châteaux à cette altitude.

La décoration du château est inspirée de l’histoire de la Maison de Savoie. Les boiseries sont réalisée en style néo-médiéval, les vitres colorées donnent des airs de cathédrale au château.

A l’intérieur on ne peut qu’admirer l’escalier monumental en bois, en double hélice. Il encadre à la perfections les vitraux colorés et concrétise magnifiquement l’esprit éclectique. Le voyageur averti y retrouve les courbes de l’Art Nouveau et les boiseries néo-médiévales.  Les deux escaliers dessinent presque les contours d’un cœur… Un clin d’œil à l’histoire sentimentale de Marguerite.

Il parait qu’à l’époque, si on avait entendu un petit train circuler sur un rail, on aurait alors compris que le repas de Madame était prêt. En effet les cuisines étaient aménagées dans un espace éloigné du château et c’est par une courte voie ferrée que les plats étaient acheminés aux convives ! Madame était incommodée par les odeurs de cuisine.

A la mort de Marguerite, le château resta inoccupé une dizaine d’années avant d’être vendu à un industriel italien, dont les descendants le vendirent à leur tour à la Région Autonome de la Vallée d’Aoste en 1981.

Villa Margherita Castel Savoia (c) CC BY SA 4 0 Hagai Agmon Snir Wikimedia Commons

On visite le Château Savoie toute l’année. En juillet et août il est ouvert du matin au soir tous les jours en horaire continu. Le reste de l’année, il est fermé les lundis, et en hiver il est fermé entre 13h et 14h.

Pour beaucoup Gressoney est une destination de vacances. En été on y vient pour randonner sur les crêtes en se rapprochant des glaciers du Mont Rose. En hiver on peut bénéficier de la taille d’un très grand domaine skiable à travers trois vallées entre Ayas et Alagna Valsesia toujours bien enneigé en altitude.

On y vient aussi pour découvrir la culture Walser dont la partie visible de l’iceberg est l’architecture des maisons traditionnelles en bois.

On y vient enfin pour admirer l’art éclectique de la Villa Margherita et de Castel Savoia, qui sont les écrins de cette belle histoire romantique vécue par la Reine Marguerite avec le Baron Peccoz et avec la vallée de Gressoney et son géant, le Mont Rose.

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Franco-italien de naissance, habitué dès mon plus jeune âge à traverser les frontières et à découvrir la culture alpine commune aux différents Pays, j’ai décidé de centrer mon activité professionnelle sur ma passion pour les Alpes, en tant que rédacteur, copywriter et consultant dans le tourisme et l’outdoor. Je pratique beaucoup de sport, j’aime lire, écrire et voyager et j’ai toujours sur moi un appareil photo !

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