Nous profitons du calme de ce moment d’été pour proposer l’introduction de Michel Moriceau au Salon international du Livre de montagne de Passy, qui se déroulera du 8 au 10 aout 2025, avec des lectures au Plateau d’Assis au mois de juillet, avec une « montagne au futur incertain ».


À l’occasion de son trente cinquième anniversaire, le Salon de Passy se tourne résolument vers l’avenir, l’avenir du livre dans toutes ses déclinaisons, de la montagne au futur
incertain, l’avenir d’un monde malmené par les excès de l’activité humaine et les aléas du climat.

Le livre a toujours accompagné les événements qui ont marqué l’histoire de la montagne. Il se renouvelle sans cesse, transcende les genres, s’ouvre à tous les publics. Des
récits, des romans, des essais sont devenus des classiques.

La photographie, la bande dessinée sont aujourd’hui les vecteurs indispensables d’une culture fondée sur l’attachement aux lieux et le partage des émotions.

Le 9° art, désormais intégré à la programmation du Salon, attire notre attention sur la futilité des exploits, la maîtrise du risque, la proximité de la mort et la valeur de la vie. La
BD de montagne n’occulte aucun sujet. Elle témoigne du tragique des situations et anticipe les bouleversements à venir. Mais elle sait également amuser, elle illustre de grands textes, transmet l’espoir à travers l’évocation des figures exemplaires du passé. Les scénaristes et les dessinateurs sont des passeurs de rêves mais aussi d’idées. Avec les écrivains et les scientifiques, ils participent à l’explication de l’histoire et de l’actualité.

Le réchauffement climatique sur les paysages, les habitudes et les comportements

Au premier rang des préoccupations qui nous interpellent aujourd’hui, reviennent en boucle et à juste titre, les effets du réchauffement climatique sur les paysages, les
habitudes et les comportements. En montagne, les glaciers vivent et se métamorphosent.

Autrefois grandioses, ils régressent, se salissent, fondent sur d’imposants pierriers.
Leur disparition est annoncée et les événements récents rappellent la fragilité d’un espace qui paraissait immuable et se dégrade depuis des années sous les yeux impuissants voire indifférents d’une société consumériste et ludique qui profite de la montagne sans en prendre soin.

L’émerveillement des auteurs romantiques est désormais voilé par l’inquiétude des experts . Ils dressent le constat d’une nature redevenue sauvage. Plus question de domestiquer ce qui nous entoure. Il est l’heure de se réveiller.

Déjà, au début de siècle nouveau, lors de la quinzième édition du Salon de Passy, de nombreux invités éveillaient les consciences face aux modifications du climat et aux conséquences de la pollution. Leroy-Ladurie, Lorius, Raynaud et les géographes de l’EDYTEM préparaient les esprits à l’inéluctable déclin de la planète blanche. François Labande, dès 2004, proposait de « Sauver la montagne » par une politique de protection du sol, de la flore et de la faune déplorant la surconsommation et l’industrialisation des sites.

Le constat était sévère. Vingt ans après, le temps n’est plus aux lamentations devant les murs de pierres et les torrents qui ravinent. Sylvain Coutterand, géomorphologue et pédagogue passionné met régulièrement à jour son Atlas des glaciers disparus. Les rééditions se succèdent. Puissent leurs lectures infléchir nos comportement.

Comprendre les modifications du réel

En effet, il y a urgence à comprendre les modifications du réel, à écouter « ceux qui savent » en évitant les commentaires infondés trainant sur internet comme au café du commerce.

Le salut réside dans la faculté de s’adapter et d’agir, à l’échelon individuel et collectif, en inventant d’autres pratiques, plus écologiques et raisonnables. La neige est en deuil. Alors, cessons de mettre en danger d’autres vies que la sienne. La nature est en mouvement. La montagne se dégrade et plus personne ne peut le nier. Un piège se referme. Mais les romanciers, les philosophes continuent de s’aventurer sur le versant du soleil où brille leur esprit créatif. Les poètes, les artistes posent des passerelles entre les époques, exaltent la beauté quand elle est simple. Ils lient l’effort à la pensée, inspirent des heures propices à la méditation.

Ils incitent à la sauvegarde d’un héritage commun pour que 2025 soit l’Année des glaciers dans les livres et dans les actes. Il en est de la montagne comme de la ville, « sa forme change plus vite, hélas, que le cœur des mortels. »

L’inquiétude de Baudelaire est décuplée par le réchauffement accéléré des lieux où se rejoignent la terre et le ciel.

L’écrit donne à la montagne des gages d’intimité et d’amitié. Le Salon de Passy, au Parvis des FIZ, offre une vue privilégiée sur le Mont-Blanc. Il est du 8 au 10 août 2025 un moment de fraîcheur et de bonheur partagé pour celles et ceux qui assouvissent dans la lecture un besoin d’altitude et un désir d’avenir.


Cette introduction se trouve aussi sur le programme du Salon international du Livre de montagne de Passy de 2025

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