Le mouvement italien No Tav (no Treno ad Alta Velocità) a donné lieu a une manif contre la ligne ferroviaire Turin-Lyon, mais aussi à des attaques aux chantiers dans le Val de Suse le samedi 26 juillet 2025, lors de la traditionnelle marche de Venaus organisée dans le cadre du festival Alta Felicità.
Des milliers de personnes ont participé à une manifestation pacifique dont certains participants se sont détachés pour mener trois actions coordonnées contre les chantiers du Lyon-Turin et avec le blocage partiel de l’autoroute Turin-Fréjus.
Le chantier de la Lyon-Turin à Traduerivi, nouvelle cible de la manifestation, a fait l’objet de l’action la plus importante. Après les habituels coups de pierres et de bâtons sur les filets, des activistes ont réussi à pénétrer sur le chantier et à mettre le feu à trois toilettes chimiques. Les flammes ont soulevé des colonnes de fumée, les pompiers sont intervenus pour éteindre le feu.
Autoroute occupée : circulation bloquée pendant plusieurs heures
Au même moment, un deuxième groupe de manifestants a bloqué la chaussée de l’autoroute Turin-Bardonecchia près de San Didero, mettant le feu à des broussailles et ralentissant la circulation pendant quelques heures, et en direction de Turin jusqu’à 20 heures. Une troisième action a eu lieu sur le chantier historique de Chiomonte, déjà théâtre d’attaques ces dernières années, avec des pierres et des « bomba carta » (un engin explosif rudimentaire) contre les forces de l’ordre, qui ont répliqué avec des canons à eau.
D’une part, les trois actions simultanées et structurées confirment la capacité d’organisation, d’autre part, il convient de noter une intervention plus limitée des forces de l’ordre. S’agissant d’un événement qui se répète régulièrement chaque année, plusieurs parties des chantiers ont été débarrassées du matériel et des véhicules qui auraient pu subir des dommages importants, limitant ainsi les effets des attaques.
Par ailleurs, le contexte juridique a également changé. En Italie, le « Décret Sécurité », devenu loi le 9 juin 2025, prévoit en effet un durcissement des sanctions et des peines en cas de violences ou de menaces à l’encontre d’agents publics (par exemple la police) lorsque l’objectif est d’empêcher la construction d’infrastructures liées à l’énergie, aux services de transport, aux télécommunications ou à d’autres services publics.
L’identification des auteurs, si on y arrive, permettra d’obtenir un effet d’endiguement et de répression plus important que les confrontations directes sur les chantiers.
Le festival Alta Felicità et les deux environnements du mouvement
La journée du 26 juillet a confirmé l’existence de deux ambiances du mouvement No Tav dans la vallée de Suse. Il y a un côté pacifique, avec des familles et des enfants, et de l’autre côté, il y a des activistes et des groupes radicaux – venus également de loin – qui sont orientés vers la confrontation violente. L’absence d’Alberto Perino, porte-parole historique du mouvement décédé en octobre 2024, a laissé la place à de nouvelles personnes. Celles-ci sont moins reconnaissables, en partie à la recherche de nouvelles méthodes de désobéissance active et en partie dans la continuité des attaques traditionnelles sur les sites. Les événements de cette année ont été quelque peu surprenants, car les tensions, bien que confirmées ces dernières années, avaient diminué en intensité.
Pour la partie pacifique des journées No TAV, le festival Alta Felicità, à Venaus dans le Val di Susa du 25 au 27 juillet, a accueilli plusieurs groupes et représentants musicaux, dont Modena City Ramblers, Punkreas, Mellow Mood, The Rumjacks Mondo Marcio, Johnson Righeira et d’autres.

Même en 2025, le camp a accueilli des milliers de personnes venues d’Italie et de divers endroits d’Europe, avec des concerts gratuits, des débats, des ateliers et diverses actions visant à réduire les déchets et l’impact sur le territoire. Les deux parties du mouvement sont cependant liées, bien qu’indirectement. Du côté « pacifique », aucune voix dissidente significative ne se fait entendre et aucune prise de distance ou mesure pour contenir les groupes plus radicaux n’a été observée.
Réactions et incendie d’une caravane d’activistes
La presidente du Conseil des ministres italien, Giorgia Meloni, a qualifié les événements de « actes de guérilla urbaine indignes d’une nation civilisée » et a rappelé le Décret Sécurité. Le ministre de l’intérieur Matteo Piantedosi a parlé de « extrémisme idéologique à isoler ». L’opposition a réagi en accusant l’exécutif de laisser la police sans moyens adéquats.
De Venaus à Suse, les maires ont exprimé leur inquiétude face à la violence, même de la part de ceux qui restent opposés au Lyon-Turin, ce qui est également un signe à noter. Enfin, si d’autres sujets ont également émergé dans les manifestations, comme l’opposition aux Jeux olympiques d’hiver de Milan-Cortina ou la crise au Moyen-Orient, rien n’a été dit sur le doublement du tunnel routier du Fréjus. Celui-ci est inauguré le 28 février, au lendemain de la fin du festival de Venaus.
Enfin, dans la nuit du 26 au 27 juillet, un incendie s’est déclaré dans une caravane inutilisée dans la zone où se trouvaient les militants de No Tav, à San Didero. Les flammes se sont également propagées sous l’effet du vent et les pompiers les ont ensuite éteintes, Il n’y a pas eu de blessés, mais une polémique quant à leur origine.
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