La restauration de l’Abbaye de Novalesa, dans le Piémont, se concentre sur la conservation préventive et sur les fresques médiévales. Le projet, soutenu par la Fondation Compagnia di San Paolo, propose un modèle de protection durable et participative du patrimoine culturel.
Située dans la haute vallée de Suse, près du col du Mont-Cenis, l’Abbaye des saints Pierre et André de Novalaise représente l’un des complexes monastiques les plus importants des Alpes. Fondée en 726, l’abbaye est aujourd’hui au centre d’une intervention conservatrice qui dépasse la logique de l’urgence et se concentre sur l’entretien planifié, l’analyse diagnostique et l’implication de la communauté. Il s’agit d’une nouveauté dans l’approche et la méthode.
L’abbaye, fondée par le noble franc Abbon en 726 pour garder le col du Mont-Cenis, conserve une stratification architecturale millénaire. L’église actuelle, reconstruite en style baroque en 1710, intègre des vestiges romans et des fresques médiévales, notamment dans la chapelle de Saint-Eldrade, qui abrite des cycles de peinture du XIe siècle. Les chapelles de la Sainte-Marie, du Saint-Sauveur et Saint-Michel se trouvent également autour du complexe.
Devenue propriété de la Province de Turin en 1972 (aujourd’hui Città metropolitana), l’abbaye est aujourd’hui confiée à une communauté bénédictine de Sublacens et abrite un musée archéologique et un atelier de restauration de livres.
Restauration durable de l’Abbaye de Novalesa
Le projet de restauration, réalisé dans le cadre du programme PRIMa (Prévention, Recherche, Investigation, Entretien, Écoute) de la Fondation Compagnia di San Paolo, est basé sur une approche intégrée combinant intervention de conservation et gestion durable. Les travaux ont concerné quatre zones principales du complexe : la chapelle de Saint-Eldrade, l’église abbatiale, la Chambre étoilée et l’extérieur de la Chapelle de Saint-Michel.
Outre la restauration des plâtres et des fresques, une attention particulière a été accordée à l ‘environnement physique dans lequel les œuvres sont conservées, avec une attention particulière aux facteurs de risque tels que l’humidité, les changements de température et les sels de désintégration. Les interventions comprennent des plans d’entretien programmés et un système de surveillance constante. Il s’agit donc d’une approche préventive.
Le projet a fait appel à des technologies non destructives et à des instruments scientifiques pour documenter l’état de conservation et prévenir les dommages futurs. Le Département interuniversitaire de science, conception et politique territoriales (DIST) de l’École polytechnique de Turin a réalisé des analyses environnementales et thermographiques, des études structurelles et des études sur la répartition de l’humidité.
Les investigations ont fait appel à la cartographie thermique, à l’analyse chimico-physique des matériaux, à des capteurs pour le contrôle microclimatique et à des scanners 3D pour documenter les surfaces peintes à fresque. Des phénomènes tels que les microlésions, les décollements de plâtre et les changements environnementaux potentiellement dommageables ont ainsi pu être détectés.
L’objectif principal était la création d’un« dossier de l’état de conservation » pour chaque zone de fresques, un outil fondamental pour planifier les interventions futures et réduire la nécessité d’une restauration invasive.

Une nouvelle philosophie d’intervention
Lors de la journée publique de restitution du 25 septembre 2025, intitulée Les enduits peints de l’ensemble abbatial de Novalesa. De la restauration à la conservation préventive, la philosophie du projet a été illustrée : éviter la dégradation en améliorant le contexte environnemental, plutôt que d’intervenir seulement après les dommages.
Comme l’a expliqué Maria Concetta Capua, responsable technique de Koinè Conservazione Beni Culturali, « la restauration d’une œuvre est toujours un traumatisme », tandis que la conservation préventive permet une protection durable et moins invasive.
Selon Laura Fornara, de la Fondation Compagnia di San Paolo, le succès de l’intervention a été possible grâce à la « consultation institutionnelle et à la volonté des moines », qui ont accompagné les activités au jour le jour.
Le prieur de l’abbaye, Michael Davide Semeraro, a souligné que la communauté vit l’abbaye comme un lieu de garde partagée. L’intervention, a-t-il dit, a renforcé le lien entre les moines, les institutions et les professionnels impliqués.
Vers le 1300e anniversaire
L’année 2026 marquera les 1300 ans de la fondation de l’abbaye. Un programme d’initiatives culturelles destinées à la communauté locale est en cours de préparation pour cette occasion. Jacopo Suppo, adjoint au maire de la Città metropolitana, a rappelé qu’il y a quelques années, l’abbaye risquait de fermer faute de moines. Aujourd’hui, grâce à une gestion partagée, elle est redevenue un centre actif du territoire.
Valeria Moratti, de la Soprintendenza Archeologia, Belle Arti e Paesaggio (Surintendance de l’archéologie, des beaux-arts et du paysage), a également souligné l’importance de l’entretien ordinaire, trop souvent négligé au profit de travaux de restauration plus visibles, mais moins durables.
Outre les interventions techniques, le projet comprend des activités d’information du public : des expositions, des réunions, du matériel d’information et des outils numériques rendent les résultats accessibles, favorisant la sensibilisation à l’un des lieux les plus significatifs de la vallée de Suse et des Alpes occidentales.

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